<<Extrait du carnet de recherche.Essai pour la couverture de la partition.
Extrait du carnet de recherche. Essai pour la couverture de la partition.>>
Porte document A5 (verso couleur), carte plastique, livret A5 de 14 pages.
Contenu du livret (la partition) :
Cette pièce peut être jouée pendant l’interprétation (version « installation performative ») de Filigree and Shadow : Piano Card Pieces et/ou Piano Card Pieces (Flatbed Mix) et/ou Kuruwarri : Piano Stamp Pieces.
Cette pièce peut être jouée dans une salle de concert, dans une galerie ou dans n’importe quel espace permettant de recevoir convenablement du public et un piano. On veillera à ce que le public soit proche du piano et du pianiste. On préférera un petit espace pour proposer une certaine intimité avec l’interprète, mais d’une taille suffisante pour laisser circuler le public comme il le souhaite.
Instrument/matériel
– Piano droit ou piano à queue;
Pour le piano droit, on enlèvera le panneau du haut et le panneau du bas.
Pour le piano à queue, on enlèvera le couvercle.
– Dispositif permettant de prendre rapidement une photographie et de la projeter par exemple avec une tablette ou un smartphone ou de l’imprimer par exemple avec une imprimante mobile ;
– Carte représentant un fragment de clavier, fournie avec cette partition.
Note
Cette pièce fait suite à un long travail de musique circonstancielle.
Elle offre à l’interprète et au public d’apprendre à utiliser l’un des accessoires de ma boite à outils personnelle d’écriture de musique de poche, de musique nomade : une carte transparente représentant un fragment de clavier de piano.
Cette carte, hypersensible aux petites traces, aux macules, aux ombres, propres et projetées, à la picturalité d’un mur autant qu’aux partitions déjà là, mais en attente d’être révélée, propose des tablatures pour piano à interpréter. Sa position dans l’espace et ce qu’elle en révèle par les traces qui viennent s’y glisser, les éléments qui viennent s’y déposer, les reflets et les ombres portées visibles ainsi que sa relation en osmose ou au contraire sa parfaite hétérogénéité, par rapport au lieu choisi, s’interprètent sur le piano, dans sa totalité de corps sonore, et parfois dans l’espace lui-même.
Avec elle, vous allez arpenter l’espace dans lequel vous êtes, vous allez prendre le temps de regarder et d’entendre tous ces recoins, sans oublier le sol et le plafond. Puis vous pourrez poser cette carte dans ce lieu et ce moment pour récolter et jouer toutes les poussières qui pourront s’y déposer.
Vous pourrez aussi proposer au public d’examiner cet espace avec vous, à la recherche de toutes les traces, marques et détails infimes pour les traduire sur et dans le piano. Cette auscultation de l’inframince du lieu est une invitation à une fouille plastique du sonore, par l’exploration plastique du lieu.
Instruction de performance
Pour communiquer le plus simplement possible au public la complexité de ce projet, la performance se découpera en 3 parties. L’interprète est libre de mettre ces parties dans l’ordre qu’il souhaite. Il peut répéter certaines parties si nécessaire.
A_ jouer une photographie faite dans l’espace de jeu avec la carte par l’interprète.
B_ jouer une photographie faite dans l’espace de jeu avec la carte par une personne du public.
C_ expliquer comment jouer la carte à partir d’une photographie faite par l’interprète ou par une personne du public.
A_ jouer une photographie faite dans l’espace de jeu, avec la carte par l’interprète
a₁ Comment utiliser la carte ?
Pour l’interpréter, vous allez devoir placer dans l’espace de la salle de concert ou de la galerie cette petite carte. Vous êtes invités à circuler dans la totalité du lieu pour trouver le meilleur endroit, selon vous, où placer cette carte. Cela peut prendre le temps que vous voulez, cette quête est aussi un moment d’écoute.
Mais comment se servir de cette carte dans un lieu ? Comment peut-elle cohabiter avec une circonstance singulière qu’elle soit un espace de concert, un lieu d’exposition, une caravane, une plage ou la montagne ?
Cette carte est un outil d’écriture, qui est avant tout un réceptacle. C’est le tabernacle où va coaguler votre rencontre avec le lieu et le moment.
Vous pouvez être attentif à la manière dont réagit cette carte transparente avec le milieu :
– elle réagit à la lumière ;
– elle réceptionne des ombres portées grâce à la qualité mate de son matériau ;
– transparente, elle se superpose aux traces, fissures, marques et signes déjà là ;
– suffisamment solide, des objets divers peuvent s’y déposer, aéroport à poussières, la carte nous dit toujours le temps qu’il fait ;
Arpentant l’espace du concert ou de l’installation vous jouez avec cette carte et son environnement. Vous la déposez, coincez, clouez, collez... etc. Selon ce qui vous interpelle ou qui vous saute aux yeux. Vous serez attentif, lorsque vous réaliserez la photographie, à cadrer (Ill. 1) de manière à rendre lisible la relation de la carte avec le lieu et le moment dans lequel vous l’avez glissé.
Une fois l’endroit choisi et la carte placée, vous prendrez une photographie de celle-ci, qui rendra compte de sa relation avec la singularité du lieu que vous voulez révéler, avec votre tablette ou téléphone portable. Cette photographie est immédiatement projetée ou imprimée puis interprétée.
a₂ Comment interpréter la carte ?
L’image photographique permet de simplifier la lecture de la carte et de l’environnement comme partition.
Chaque image donne des indications et des modalités de jeux sur le clavier, sur et dans le piano et l’espace environnant. Vous devez faire une lecture précise de chaque photographie.
La carte
Une image comporte une carte représentant un fragment de clavier et un espace dans lequel cette carte est installée (illustration 2).
Par rapport à la lecture que vous faites de l’image, la carte peut correspondre à :
a) une section du clavier ;
les informations que l’on peut y lire peuvent se réduire à la portion du clavier représenté. Sa position dans l’image pourra être interprétée comme une indication de registre.
Par exemple si la carte se trouve très à gauche ou très basse vous pourrez jouer dans l’extrême basse du clavier. Au contraire, si la carte est placée dans la partie haute de l’image ou très à droite, vous pourrez choisir de jouer plutôt dans la partie aiguë du clavier.
b) à l’ensemble du clavier.
Les informations fournies par la carte se répartissent alors sur toute la tessiture de l’instrument.
Transparence, Reflets
La transparence et les reflets mettent en évidence des touches ou des ensembles de touches représentées sur la carte (illustration 3).
Les traces du dessous, les griffures, les marques du dessus, les reflets et autres ombres portées sont autant d’information à interpréter. Vous veillerez à jouer de manière exhaustive tout ce que vous percevez sur chaque carte.
Vous pouvez recommencer autant de fois que vous le désirez où que cela vous paraisse nécessaire. Les hésitations, incertitudes et autres tâtonnements peuvent faire partie de l’exécution.
Une carte se joue sur le clavier et les touches, mais aussi sur tout le mécanisme qui participe à la production du son (les chevilles, les cordes, les pédales) (illustration 4).
Une carte ne donne pas seulement des notes à jouer, mais induit des modes de jeux (clusters, glissandi, pincements, frappes, petites tapes... etc.)
Le reste de l’image, ou l’environnement proche
– Soit la carte contraste avec le reste de l’image ou l’environnement proche. Alors tout ce qui est dans l’image, mais hors du champ de la carte s’interprète hors du clavier : couvercle, pupitre, table d’harmonie, meuble cadre, pédale (comme corps sonore) jusqu’à l’espace autour du piano (il n’est pas interdit de jouer avec l’estrade, s’il y en a une, ou les murs de l’espace environnant).
– Soit la carte a une relation de porosité avec le reste de l’image ou l’environnement proche. De ce fait, les événements de l’image pourront aussi se jouer sur le clavier, les touches et tous les mécanismes de production du son : chevilles, cordes... etc.
Vous serez attentif aux textures représentées qui vous aiguilleront dans les modes de production des sons à choisir (le doigt, le bras, l’avant-bras, la pulpe des doigts, les ongles, une mailloche...), et aux lignes qui structurent la photographie ou celles lisibles dans la petite installation qu’il a réalisée dans l’espace réel, qui vous aideront à choisir les événements sonores à produire (ponctuels, répétés, rythmés, aléatoires...)(illustration 5).
Vous êtes libres. Fiez-vous à ce que l’image ou l’espace environnant évoque ou exprime. Mais si vous vous fixez une règle, veillez à la tenir sur l’ensemble des photographies choisies.
Durée
Les plans de la photographie et la circulation du regard induite par la composition vous serviront pour organiser les évènements sonores à produire, la durée d’interprétation de l’image et les différents tempos possibles. De la même manière, l’ensemble carte et environnement proche, placé temporairement dans l’espace de jeux, induit une circulation du regard qui organisera l’ordre de la production des sons, la durée de l’interprétation et son tempo.
Les plans de l’image pourront organiser l’interprétation de chaque image. Les actions sonores à produire pourront se succéder de la même manière que le premier plan, le second plan... jusqu’à l’arrière-plan. Vous pourrez aussi choisir de commencer par l’arrière-plan pour terminer par le premier plan.
La circulation du regard induite par la composition de l’image donnera aussi des indications dans la manière de structurer l’interprétation. Une composition linéaire favorisera une lecture de l’image de droite à gauche et/ou de haut en bas. Une composition circulaire pourra engager des répétitions dans les actions sonores à produire.
Une fois de plus vous êtes libre de la durée de l’interprétation sonore de chaque photographie ou chaque installation. Toutefois, vous serez sensible à rendre compte de l’immédiateté de la lecture de l’image, ou de la fragilité de l’installation dans l’espace réel. Celles-ci sont comme des Haïkus qui engagent une durée globale d’interprétation relativement courte.
Nuances
Les nuances sont laissées à votre libre interprétation. Les images photographiques évoquent des espaces et des lieux, expriment des ambiances et des acoustiques particulières. Tout cela peut se traduire en intensité. Les textures et les couleurs peuvent aussi vous aiguiller dans le choix de sa palette de nuances, davantage lorsque votre lecture se fait d’une installation in situ.
Si vous avez choisi de recommencer cette partie A, il faudra assumer chaque nouveau déplacement, chaque nouvelle recherche des singularités de l’espace, comme partie intégrante de la performance. Il ne s’agira pas de surjouer, mais d’être suffisamment claire dans votre démarche pour permettre au public de comprendre ce que vous cherchez et ce que vous allez faire (cette partie ne sera jamais jouée plus de cinq fois de suite).
B_ jouer une photographie faite dans l’espace de jeu avec la carte par une personne du public
Confiez la carte à une personne du public. Une fois la carte posée, demandez-lui de faire une photographie ou faites là vous-même. Puis reportez-vous au point a₂
C_ expliquer comment jouer la carte à partir d’une photographie faite par l’interprète ou par une personne du public. Expliquer vos choix et vos doutes. Partagez vos questionnements avec le public.
En vous appuyant sur le point a₂, décrivez une interprétation possible et expliquez le fonctionnement de la carte.
Le concert se nommera PIANO CARD PIECE # n (nombre de fois que vous avez réalisé ce concert dans ce lieu)(votre nom et/ou un indice prégnant de la circonstance et/ou le nom du lieu où vous êtes Mix).
Version alternative : à ciel ouvert
Maintenant que l’utilisation et la lecture de la carte n’ont plus de secret pour vous, vous pouvez partir en balade avec elle dans la poche,profiter des multiples circonstances sonores et visuelles que vous offre votre vie pour la glisser dans les micros événements quotidiens qui rythmeront votre parcours. Croyez-moi, ce petit objet réenchantera votre monde. N’oubliez pas de faire une photographie, c’est essentiel pour pouvoir proposer une interprétation un peu plus tard (quoique vous n’êtes d’ailleurs pas obligé de le faire). Ce sont tous ces souvenirs qui serviront de base à votre performance.
N’oubliez pas aussi de me faire parvenir ces images dont l’ensemble constituera votre partition personnelle, nommée PIANO CARD PIECE # n (votre nom et/ou un indice prégnant de la circonstance et/ou le nom du lieu où vous êtes Mix). Si vous avez choisi de préparer les images en amont du concert ou de l’installation alors chaque photographie fera l’objet d’un tirage parmi toutes les propositions de dimension d’un tirage au format 3/2 : de 22.5x15cm à 165x110 cm. Chaque tirage sera soit encadré, soit contre collé sur une plaque Dibond. Chaque encadrement sera différent : caisse américaine aluminium, caisse américaine en bois, cadre flottant, cadre standard avec ou sans passe-partout. Pour l’interprétation vous vous référerez aux instructions de Filigree and Schadow : piano card pieces.
Frédéric Mathevet (janvier 2020).
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